Réserves naturelles

 

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Les visites aux réserves (réserve de la Lefini au Congo, réserve des bonobos en RDC) représentaient pour nous des moments de ré-oxygénation (physique et morale). 

 

L’aspect positif de ces réserves consiste dans l’objectif écologique, qui est à terme le repeuplement par des espèces en voie de disparition. Il existe notamment une association dont le but est d'éradiquer le braconnage en incitant la population à pratiquer l'élevage adapté à ces régions (caprins).

Toutefois, je modère mon enthousiasme. Ces singes sont certes en liberté dans leur milieu naturel avec leur nourriture naturelle. Mais il s’agit plutôt d’une semi-liberté : les uns dans une île, les autres dans une enceinte clôturée de quelques kilomètres ; et d’un milieu semi-naturel : bien que ces bêtes disposent de la nourriture fournie par la nature, les gardes-éco leur en apportent régulièrement, autant dire qu’il reste une certaine dépendance vis-à-vis de l’homme (jugée nécessaire au début de ce repeuplement). 

Cet apport de nourriture régulier fait que les bêtes sont à l'affût de l'arrivée des gardes, et que donc les touristes sont assurés de pouvoir les contempler pendant un moment. 

 

L’aspect positif du tourisme est le financement de la réserve. Mais du point de vue strictement touristique, l’opération ne risque guère de jamais soutenir la comparaison avec ce qui est fait au Kenya par exemple ; entre voir trois singes en pseudo-liberté, et faire un vrai safari-photo, il n’y a pas … photo ! Le tourisme aux Congos est destiné à rester longtemps un tourisme très limité, pour hommes d’affaires occasionnels, week-ends entre deux négociations ou séances de travail ; alors que les tourismes dans d’autres pays d’Afrique (Kenya, Sénégal, Mali) ont pris un aspect relativement plus populaire et constituent une part non négligeable de l’économie de ces pays.

 

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1. Paysages au voisinage de la réserve de la Lefini ; dans la vallée, le Lac Bleu.

2. Même endroit. Nous sommes sortis de la 4x4 pour que le chauffeur puisse la remonter plus facilement, tant bien que mal.

3. Gorilles dans la réserve de la Lefini.

4. Un jeune gorille (1 an ½). Une fois grand, il sera lâché dans la nature.

5. Un bébé gorille (4 mois), et sa « mère » : une femme dont le travail est de s’occuper de lui.

 

 

Le désavantage de tous ces genres de tourisme est qu’ils sont complètement déconnectés de la vie réelle. Mais la vie réelle est ici tellement galère et inhospitalière, que pendant encore longtemps, il ne pourra pas y avoir d’autre forme de tourisme possible.

Enfin, on ne m’ôtera pas de la tête qu’un monde où des singes sont mieux traités que des hommes est un monde à l’envers. Il est vrai que le financement de la réserve de la Lefini provient de source privée (britannique) et non pas congolaise ; ce qui n’enlève rien à mon observation. Par contre, la réserve des bonobos est organisée par l’Etat de la RDC lui-même dans le but de développer le tourisme ; en effet la RDC souhaite faire du tourisme une activité économique en soi ; mais il en faudra beaucoup, beaucoup plus, pour que cela devienne autre chose que marginal !

 

Et ce n’est pas en développant les activités non fondamentales qu’on résorbera la misère.

Les deux Congos n’ont pas besoin d’abord d’industrie, ni de tourisme, ni d’activités tertiaires. Ils ont besoin d’abord, comme tout peuple, de satisfaire les quatre nécessités fondamentales : la nourriture, le vêtement, le logement, et la santé. Et cela, le Congo pourrait le faire par lui-même. Tout cela ne demande pas de grands investissements, et relève entièrement ici du principe écologique : en se basant simplement sur ce que fournit la nature ; la population est peu nombreuse, et la nature fournit tout. Il suffit de cultiver la terre et d’en tirer tout ce qu’il faut. L’augmentation des rendements, objectif incontournable, sera obtenu par « prolongement » des techniques traditionnelles, et non pas par substitution de ces techniques par des techniques entièrement occidentales ; par « prolongement », nous entendons : amélioration de l’instrumentation artisanale, et mécanisation partielle compatible avec ces techniques traditionnelles.

 

Pour la santé, non pas au départ un financement exorbitant de soins lourds et coûteux, mais simplement l’hygiène ; rien qu’avec l’hygiène, sûr que l’espérance de vie ferait un bond de 10 ans. L’hygiène, cela se finance, certes, mais par un équipement élémentaire, et encore plus simplement par le travail. L’emploi de ces centaines de milliers de pauvres occupés toute leur journée dimanche compris par la vente de trois kilos de bananes ou cinq boîtes de clous : un client tous les quart d’heure maximum, le reste du temps ils sont là, ils ne font rien, ils causent, ou ils se taisent ; quelquefois ils dorment (cf. photo dans le paragraphe "travail"). Dans les magasins de vêtements et de tissus par exemple, il y a le patron, et quelques figurants qui ne font quasiment rien ; rien d’autre que remettre un tissu en place de temps en temps, et de renvoyer au patron pour les conseils un peu techniques. Encore ces magasins ont-ils un air de (très relative) aisance par rapport aux plus petits commerces ; ceux que nous avons vu semblent tenus pour beaucoup par des musulmans (originaires de pays comme le Sénégal, mais pas du Maghreb).

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